Grâce à la présence d’un radiotélescope à l’écoute de l’univers, Green Bank (Virginie occidentale) est une « zone de silence ». Pas de téléphone portable, pas de wifi… Un havre pour les “malades des ondes”.
Les vaches broutent, un pick-up passe, le silence retombe. Aucune sonnerie intempestive ne trouble la quiétude de Green Bank, 143 habitants, et ses environs du comté de Pocahontas dans les Appalaches. Bienvenue au cœur de la « Quiet Zone », zone de silence radio décrétée en 1958 pour protéger le Green Bank Telescope (GBT).
Ce radiotélescope de 150 mètres de haut traque jour et nuit les signaux venus de l’espace. « On y étudie le cycle de vie des étoiles, les quelques secondes après le Big Bang, les ondes gravitationnelles », explique Mike Holstine, du National Radio Astronomy Observatory. « C’est le radiotélescope le plus sensible du monde. Il peut recevoir un signal équivalent à l’énergie d’un flocon de neige touchant le sol ».
Pour lui faciliter le travail, la National Radio Quiet Zone, unique en son genre, a été fixée en 1958 par le gouvernement. Dans un rayon de 16 kilomètres, tout ce qui produit une onde radio est banni ou sévèrement limité. Comme le wifi, les téléphones sans fil, les télécommandes ou les micro-ondes. « Un quasar émet un signal d’un milliardième de milliardième de milliardième de watt », précise M. Holstine. « Un téléphone portable en émet deux. Il brouillerait complètement le signal. »
On se sent un peu prisonnier, tout de même Une vie sans ondes… L’idéal pour des dizaines de victimes d’hypersensibilité électromagnétique venues s’installer dans cette région rurale.
C’est le cas de Charles Meckna, que l’on trouve construisant un abri de jardin pour sa petite maison au milieu des bois. Ce quinquagénaire originaire du Nebraska est arrivé en juillet. Malade depuis la fin des années 1990, il a mis beaucoup de temps avant d’attribuer ses problèmes aux ondes de son téléphone portable. Il souffrait de vomissements, migraines et arythmie cardiaque dès qu’il s’approchait de bornes wifi. « Ici, je vais beaucoup mieux. » Mais il avoue se sentir un peu prisonnier. « Et je déteste ça. »
Diane Schou était électro sensible depuis qu’une antenne-relais avait été érigée près de sa ferme dans l’Iowa ; son mari lui avait bricolé une sorte de « cage de Faraday » couverte d’aluminium. Elle est arrivée à Green Bank en 2007. « Je n’ai pas le choix. Ici, je peux avoir une vie, inviter des amis. »
Mme Schou a un ordinateur relié au téléphone et « très lent » ; elle l’ouvre quelques dizaines de minutes par jour pour regarder les courriels de son mari, resté dans l’Iowa mais qui vient la rejoindre quelques mois par an. Les “non sensibles” jouent le jeu. Chez Trent’s, épicerie/station-service située à moins d’un kilomètre du télescope, l’absence de téléphone portable ne gêne personne. Betty, la caissière, s’esclaffe : « On n’en a jamais eu alors ça ne nous manque pas ! »
SOURCE : DNA du 16.11.2014