« Nous réalisons que la destinée de l’humanité est profondément solidaire de celle de la Terre ».
Le Père François EUVé. Jésuite, théologien, physicien. Directeur de la revue Études.
PANORAMA n° 516 Mars 2015
Un mot nouveau apparaît dans notre vocabulaire : « anthropocène ». Il est encore rare, un peu exotique, mais il le sera de moins en moins. C’est l’idée qu’il exprime qui mérite qu’on s’y arrête. Le suffixe Cène (du grec leainós; récent) indique qu’il s’agit d’une ère géologique, et ant/oropos signifie que l’humain y est impliqué. Ce concept dit simplement que, depuis environ deux siècles, précisément depuis la Révolution industrielle, l’humanité est devenue une « force géologique ». Elle n’habite plus seulement une planète. Elle ne se contente plus d’en exploiter les ressources à son profit. Elle en modifie profondément les caractéristiques, les mécanismes, les équilibres. L’évolution du climat en est désormais le signe le plus tangible.
Il nous faut réaliser le changement profond que cela implique. J’en retiendrai deux aspects. D’une part, nous réalisons que la destinée de l’humanité est profondément solidaire de celle de la Terre. Sans doute un Teilhard de Chardin nous avait-il déjà avertis sur cela en montrant que toute chose ne trouve sa consistance définitive que dans une communion universelle, une « vie cosmique ». Plus récemment, Jean Bastaire s’est employé, livre après livre, à réveiller les consciences. Et la Bible disait bien que l’Adam est tiré de l’adamah, l’humain de l’humus de la terre. Par méfiance à l’égard du « paganisme », un certain monothéisme intransigeant avait oublié la dimension profondément charnelle du christianisme.
D’autre part, nous prenons conscience que nous sommes embarqués dans une histoire dont il est très difficile d’anticiper les développements à venir. Nous étions habitués à une certaine stabilité (la régularité des saisons) et il nous faudra nous adapter à des changements dont nous ne savons pas trop les conséquences.
Cela peut nous inquiéter, ré exhumer des craintes « apocalyptiques ». Rappelons-nous que le message biblique est porteur d’une vigoureuse parole d’espérance. Rien n’est irrémédiable. Ainsi, « ceux qui espèrent dans le Seigneur retrempent leur énergie » (Is 40,31).
Mon bonus ou plutôt un constat.
Au fil des analyses géobiologiques que je suis amené à effectuer, je constate une augmentation des « désordres » liés à l’activité humaine exclusivement - notamment les ondes électromagnétiques haute et basse fréquence- bien plus que ceux du tellurique.