Les plats à base de poisson ou de viande crus séduisent de plus en plus. S’ils présentent un intérêt nutritionnel incontestable, quelles quantités consommer et quelles variétés préférer ?
Sushi, tartare, carpaccio. .. En France, viandes et poissons se déclinent de plus en plus en version crue. Côté mer, l’engouement pour les sushis s‘apparente au succès que connaît la gastronomie japonaise. Une cuisine faite de petites portions peu caloriques, sans ajout de matière grasse, et dont l’image est associée à l’étonnante longévité des Japonais. Côté terre, carpaccio et tartare font toujours recette. Une tendance qui concerne surtout le bœuf comme l’explique Florence Foucault, diététicienne: « Par l’apprentissage et l’expérience, les hommes ont adapté les modes de cuisson suivant le niveau de risque. Ainsi, le gibier ne se consomme jamais cm et le porc toujours cuit. » « Manger de la viande a toujours été associé à la prospérité, rappelle le docteur Olivier Goudron, professeur de nutrition associé à l’université de Bourgogne. Cela explique pourquoi, malgré son impact négatif sur l’environnement, la consommation de viande n’a cessé de croître. »
En France, nous consommons aujourd’hui près de 90 kg de viande par an et par personne contre 50 kg au début du XX° siècle.
700 g par semaine.
C’est la quantité de viande rouge crue, qui équivaut à 500 g de viande rouge cuite, que le Fonds mondial de recherche contre le cancer conseille de ne pas dépasser pour limiter le risque de cancers digestifs. 39 % des hommes et 13 % des femmes sont au-delà des recommandations.
La richesse des chairs en vitamines et oligoéléments est altérée par la cuisson à partir de 62 °C. La viande de bœuf, base des préparations carnées crues, est une source de vitamine B12, zinc et fer. La vitamine B12 est indispensable au bon fonctionnement des globules rouges, des cellules nerveuses et à la synthèse de l’ADN, tandis que le zinc participe au bon fonctionnement du système immunitaire et à la synthèse des protéines. Le fer intervient dans la constitution de l’hémoglobine et de la myoglobine, qui transportent et stockent l’oxygène. Un excès de viande rouge crue peut entraîner une surcharge en fer chez les femmes ménopausées qui en éliminent peu.
Selon un rapport du Fonds mondial de recherche contre le cancer, une consommation quotidienne de viande rouge excédant 100 grammes augmenterait de 29 % le risque de cancers colorectaux. Il est donc recommandé de limiter sa consommation hebdomadaire à 500 g lorsqu’elle est cuite, soit 700 g crue, en alternance avec d’autres sources de protéines: viandes blanches, poisson, œufs ou légumineuses.
Le poisson cru est une source de vitamine D qui régule le métabolisme du calcium et aide les os à rester solides. Attention à ne pas consommer trop de poissons gras sauvages. Prédateurs en bout de chaîne alimentaire, ils sont plus fortement contaminés en dioxines et polychlorobiphényles (PCB) que les poissons d’élevage.
Certains d’entre eux sont riches en acides gras oméga 3, très sensibles à la cuisson et dont le rôle protecteur des vaisseaux sanguins est reconnu. Mais leur proportion doit se faire dans un rapport idéal de un à trois avec les oméga 6. Or un Français consomme en moyenne dix à quinze fois plus d’oméga 6 que d’oméga 3. Les poissons gras (thon, saumon) sont riches en oméga 3 à longue chaîne: les EPA et DHA Ils peuvent être fabriqués par le foie à partir de l’acide alpha-linoléique présent dans l’huile de lin ou le colza, mais cette production interne ne suffit pas à couvrir les besoins humains. Une portion de poisson gras cru couvre 20 % des besoins hebdomadaires en oméga 3 d’un homme et 25 % de ceux d’une femme. Pour la viande, l’herbe laissant peu place au soja et au mais - très riches en oméga 6 - dans l’alimentation du bétail, le taux d’oméga 3 a considérablement baissé. On privilégiera donc les carpaccios et tartares de viande issue de la filière Bleu-blanc-cœur, qui garantit une alimentation des bovins riche en oméga 3.
Attention aux parasites présents dans les tissus musculaires de mammifères ou de poissons. En France, le plus couramment contracté est le taenia saginata ou ver solitaire qui peut atteindre 12 mètres et est transmis par le bœuf. Bénin, il peut entraîner des douleurs abdominales. Le taenia solium, parasite du porc, est en revanche dangereux. Le porc doit donc être cuit à plus de 160 °C. La principale parasitose provoquée par l’ingestion de poisson cru est l’anisakiose, due aux vers anisakis, parasites du système digestif des poissons marins, qui migrent dans les muscles de leur hôte au moment de sa mort. Ces vers blancs longs de 3 cm se fixent aux muqueuses digestives de l’homme, entraînant ulcères, allergies et perforations digestives. L’anisakis se retrouve dans 7l % des saumons pêchés dans les eaux européennes. Les modalités de pêche industrielle imposent de vider le poisson directement sur les bateaux afin d’éviter toute contamination, mais le risque zéro n’existe pas et les petits pêcheurs ne sont pas soumis à cette obligation. En dehors de l’éviscération et d’une cuisson à plus de 70 °C, la surgélation, à ne pas confondre, avec la congélation, est efficace.
La consommation de produits animaux crus doit être proscrite chez la femme enceinte en raison du risque de toxoplasmose provoquée par un parasite microscopique des animaux herbivores. Il peut être fatal aux fœtus des femmes primo-infectées pendant leur grossesse, et son dépistage est obligatoire. Dans le reste de la population, la consommation de chair crue expose également à un risque de parasitose, mais pas de flambée et le ténia du bœuf reste bénin.
Lexique.
Acides gras essentiels: lipides apportés exclusivement par l’alimentation, notre corps ne sachant pas fabriquer. Ce sont l’acide linoléique, dont découlent les oméga 6 et l’acide alphalinolénique, dont découlent les oméga 3.
Surgélation : abaissement rapide de la température d’un aliment jusqu’à -4O °C pour obtenir une température à cœur inférieure à -20 °C. La congélation, pratique ménagère, refroidit progressivement les aliments jusqu’à -20C°
Source : Sciences et Avenir, octobre 2011