Vous êtes-vous déjà senti tout à coup très seul au milieu d'un groupe, en réalisant que chacun semblait prêter davantage attention à ses conversations en ligne qu'à votre présence ? Avez-vous déjà manqué d'écraser un piéton trop occupé à envoyer un SMS pour regarder à droite et à gauche avant de traverser ? Nos nouveaux joujoux technologiques ne modifient pas seulement notre façon de lire, d'apprendre ou de réfléchir, ils ont aussi des effets sur nos comportements. Et engendrent des troubles spécifiques — pour certains potentiellement dangereux — auxquels chercheurs et psychologues commencent à s'intéresser.
La cybercondrie. L'hypocondrie alimentée par Internet.
«La cybercondrie est une hypocondrie d'un genre nouveau qui touche les personnes développant déjà ce type de trouble», explique le psychiatre Laurent Karila, qui poursuit: «La surabondance d'informations médicales accessibles sur Internet ne fait qu'alimenter les angoisses de ceux qui sont persuadés d'avoir une maladie grave.» Ce phénomène commence à être étudié par les médecins et a même fait l'objet d'une thèse en 2014 à la faculté de médecine de Toulouse.
La nomophobie. La peur d'être séparé de son mobile.
Contraction de no mobile phobia, la nomophobie désigne la peur d'oublier son mobile, de ne plus avoir de batterie ou de réseau. En 2012, un millier d'étudiants d'une douzaine d'universités des cinq continents ont été privés de portable, pour une vaste étude baptisée The World Unplugged. La moitié a avoué ressentir un sentiment de panique, de l'anxiété et même des palpitations cardiaques, et n'a pas réussi à tenir vingt-quatre heures. Ces symptômes sont souvent associés à l'angoisse de la déconnexion appelée «fomo» (fear of missing out) qui conduit à ne jamais couper son mobile par crainte de rater des échanges, des notifications Facebook, des tweets...
Le phubbing. Préférer son téléphone portable à ses amis.
Ce néologisme inventé par un étudiant australien à partir de phone (téléphone) et snubbing (snober) désigne la tendance à accorder plus d'attention à ses amis virtuels qu'aux vraies personnes. Cette nouvelle forme d'incivilité peut aussi être une manière de montrer à votre interlocuteur que vous avez mieux à faire que de lui parler. Selon une étude publiée en mars par deux psychologues de l'université du Kent (Royaume-Uni), le phubbing peut conduire à terme à une réelle forme d'exclusion sociale.
La ringxiety. Le syndrome de la sonnerie fantôme.
Deux personnes sur trois ont déjà entendu leur téléphone sonner ou l'ont senti vibrer par erreur, selon une étude publiée par la revue Social and Behavioral Sciences. Ce phénomène psychoacoustique traduit un état d'hypervigilance du cerveau vis-à-vis des moindres sollicitations de nos outils numériques. Pour le psychiatre Laurent Karila, il ne faut pas s'inquiéter outre mesure tant que cela reste anecdotique.«C'est anormal quand cela se répète très régulièrement», estime-t-il.
La selfite. L'envie irrépressible de se prendre en photo.
Apparu dans un article satirique américain en 2014, le terme «selfitis» («selfite» en français) a été sérieusement repris dans une étude récente par des chercheurs britanniques et indiens: ils ont analysé l'état d'esprit de 400 étudiants en Inde, où 14 personnes (sur la trentaine estimée dans le monde) ont trouvé la mort en 2017 en se prenant en photo, et qualifient la selfite de « maladie mentale». Cette étude est toutefois très controversée.
Le smobisme. L'obsession du smartphone qui fait risquer l'accident.
Comme un zombie équipé d'un smartphone, le smombie avance les yeux rivés sur son téléphone, au point d'en négliger son environnement et de mettre sa vie en danger. Selon une enquête OpinionWay pour GMF Assurances d'avril dernier, 77% des Français téléphonent en marchant. Chez les jeunes, ce chiffre atteint 95% et ils sont 92% à lire ou à envoyer des SMS. Par ailleurs, 14% des utilisateurs ont déjà frôlé l'accident (18% chez les 18-24 ans) et 8% se sont déjà fait renverser par un véhicule (13% chez les 18-24 ans).
Source et images : ça m’intéresse n° 454