Depuis le 1er juillet 2018 et la transposition de la directive 2013/59/Euratom en droit français, toutes les entreprises doivent s'interroger sur le radon et intégrer à leur évaluation des risques professionnels l'exposition de leurs salariés à ce gaz radioactif naturel.
Explications.
Repères :
1 Becquerel (Bq) équivaut à une désintégration par seconde. Pour mesurer la concentration du radon dans l'air, c'est le Bq/m3 qui est utilisé.
Le Sievert (Sv) est l'unité utilisée pour donner une évaluation de l'impact des rayonnements ionisants sur l'homme. Le rapporter à une durée (mSv/an) permet d'exprimer l'exposition annuelle.
Été 2018, la transposition de la directive Euratom dans notre droit national a fait prendre un tournant à la radioprotection au travail, notamment en ce qui concerne le radon. Dorénavant, l'exposition à ce gaz radioactif doit faire partie de l'évaluation des risques que toute entreprise est dans l'obligation de réaliser. Quelles que soient leurs activités, qu'elles utilisent des sources radioactives ou non, toutes doivent se pencher sur la question. Car le radon, exhalé naturellement par les sols et que l'on retrouve de ce fait en permanence et partout à la surface de la terre, est responsable d'environ un tiers des expositions annuelles à la radioactivité de la population française. Principalement dégagé par les sous-sols granitiques et volcaniques, ainsi que par certains matériaux de construction, le radon, inodore et incolore, est un des maillons de la chaîne de désintégration de l'uranium. Comme tous les éléments radioactifs, celui-ci se transforme, en émettant des particules et des rayonnements, en d'autres éléments qui se désintègrent à leur tour jusqu'à aboutir à un élément stable, le plomb 206. Ainsi, même si l'on parle du risque radon, ce sont plus directement ses descendants, les polonium 218 et 214, qui sont en cause. En se déposant sur les poussières en suspension dans l'air, ils peuvent être inhalés et se fixent dans les alvéoles pulmonaires. Lors de leur désintégration, les particules émises peuvent casser l'ADN des cellules et entraîner, dans certains cas, l'apparition de cancers. Mais par où un employeur doit-il commencer pour répondre à la nouvelle obligation d'évaluer ce risque ? Premièrement, vérifier si ses locaux sont installés dans une zone à fort potentiel radon. Il suffit pour ce faire de consulter la carte de France interactive réalisée et tenue à jour par l'Institut de radioprotection et de sureté nucléaire (IRSN). Elle classe les communes de l'Hexagone en trois catégories. Si une entreprise est située en zone 1, aucune mesure n'est a priori nécessaire. « À moins que l'employeur ait connaissance de spécificités de son terrain ou que son activité amène ses employés à travailler en sous-sol dans des locaux confinés, il n'y a pas lieu de faire d'analyses plus poussées », affirme Nicolas Michel, chef de la cellule enseignement du pôle santé-environne-ment de l'IRSN. En revanche, un professionnel installé en zone 2 devra se renseigner auprès des services territoriaux pour savoir si ses locaux se situent sur des particularités géologiques aggravant les émanations de radon, comme des cavités souterraines ou des galeries de mines. « Si tel est le cas, il devra réaliser des mesures afin d'évaluer précisément le risque », poursuit l'expert. Enfin, en zone 3, mesurer le taux de radon s'impose aussi bien en sous-sol qu'au rez-de-chaussée. En effet, les évolutions réglementaires découlant de la transposition de la directive Euratom ont élargi à ces niveaux les actions en faveur de la prévention du risque radon.
Diagnostiquer ses locaux Il existe sur le marché des détecteurs solides de traces nucléaires (DSTN) conçus spécifiquement pour le radon. Pour quelques dizaines d'euros, et en s'appliquant à bien suivre la notice des dispositifs, il est possible de faire un premier dépistage. « Il y a d'énormes variations de concentration en radon dans l'air en fonction du moment de la journée, de la température... Il faut donc laisser ces DSTN, qui sont passifs, de deux à trois mois dans les pièces visées par les mesures, explique Patrick Moureaux, expert conseil technique à l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Plus les détecteurs resteront longtemps en place, plus la moyenne annuelle calculée de la concentration dans l'air du radon reflétera l'exposition des occupants de ces locaux. » Si l'activité volumique du radon dépasse avec précision le niveau de référence de 300 becquerels/m3 (Bq/m3) en moyenne annuelle, l'entreprise doit mettre en œuvre des actions pour réduire l'exposition des travailleurs.
Et pour faire les bons choix, une analyse plus complète doit être lancée, si nécessaire avec l'aide d'experts extérieurs pour diagnostiquer les locaux, notamment du point de vue de la ventilation. « Dans 90% des cas, permettre un renouvellement d'air conforme à la réglementation, c'est-à-dire, pour un bureau, de l'ordre de 25 m3 par heure et par occupant, que ce soit en réparant la ventilation ou simplement en la nettoyant, règle le problème », rassure Nicolas Michel. Quand cela ne suffit pas, il faut passer à de plus gros travaux, comme le remplacement du circuit de ventilation pour en augmenter la puissance tout en évitant la mise en dépression qui peut drainer davantage de radon. Ce dernier s'infiltrant depuis le sol, revoir l'étanchéité à ce niveau est un autre levier d'action. Même quand la dalle semble imperméable, le radon, en bon gaz qu'il est, peut s'infiltrer dans la moindre fissure et profiter de tous les interstices existants, comme ceux entre les canalisations et le plancher, par exemple. Si malgré ces démarches, la présence du radon reste supérieure à 300 Bq/m3, il faut alors estimer la dose de radioactivité reçue par les salariés. Les lieux dans l'entreprise où l'exposition dépasse les 6 millisieverts par an (mSv/an) doivent être classés en zone réglementée « radon » et faire l'objet d'une signalétique.
Toute personne travaillant dans ce périmètre doit être informée sur ce risque et un dosimètre doit permettre le suivi de son exposition qui ne devra pas dépasser les 20 mSv/an, sans que pour autant le travailleur soit classé comme salarié exposé aux rayonnements ionisants s'il n'est exposé qu'au radon. Il doit en outre faire l'objet d'un suivi individuel renforcé par les services de santé au travail. Tout cela nécessite une organisation solide avec notamment un conseiller en radioprotection qui peut être soit le préventeur de l'entreprise formé comme conseiller en radioprotection (CRP) soit l'un des futurs organismes compétents en radioprotection (OCR) en cours de création (aujourd'hui personne compétente en radioprotection (PCR) externe).
La concentration en radon n'augure pas de la dose reçue.
Dans deux locaux présentant la même concentration de radon, en fonction de leurs caractéristiques respectives, les doses reçues par les personnes présentes peuvent être différentes. En effet, si dans un local l'aération porte le facteur d'équilibre à 0,5, ce qui signifie que l'air contient 50% de radon et 50% de ses descendants, ces derniers peuvent quasiment disparaître quand le renouvellement d'air est très élevé faisant de ce fait baisser la dose.
Les techniques pour réduire le radon
SOURCE : 26 travail & sécurité - n° 805 - mai 2019 - Damien Larroque
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