Ah, si nous avions douze doigts. La face du monde aurait été changée!
Au lieu de compter en base décimale comme il est naturel avec dix doigts, nous aurions utilisé la base duodécimale, beaucoup plus pratique.
En effet, 12 est un nombre dit « abondant »: la somme de ses diviseurs entiers est supérieure à son double (1+2+3+4+6+12 = 28), alors que 10 est au contraire déficient (1+2+5+10 = 18). Or un nombre abondant permet davantage de divisions ayant pour résultat des nombres entiers... et donc un progrès des mathématiques plus rapide.
Au Moyen Âge, la base 12 était courante: douze pouces pour un pied, douze deniers pour un sou, etc. Notre manière de dénombrer les œufs, les huîtres ou encore les escargots par douzaines en porte la trace.
Les Celtes, quant à eux, comptaient en base 20, nombre abondant lui aussi (1+2+4+5+10+20 = 42), ce qui est aussi naturel avec dix doigts et dix orteils. Notre « quatre-vingts » en est un vestige, tout comme l'hôpital des Quinze-Vingts, à Paris, qui pouvait héberger 300 aveugles pauvres.
Nous avons enfin emprunté notre mesure des angles et du temps aux Babyloniens qui utilisaient, eux, la base 60, dont la somme des diviseurs est 168 :(1+2+3+4+5+6+10+12+15+20+30+60).
Bien que 60 soit plus abondant que 12, leurs mathématiques ne se développèrent pas aussi bien qu'espéré, car il aurait fallu nommer différemment cinquante-neuf chiffres! En outre, ils ne connaissaient pas le zéro.
Or pour calculer facilement, il faut non seulement une base abondante, mais aussi une numération dite de position, dans laquelle le rang de chaque chiffre indique par quelle puissance de la base il doit être multiplié, et un symbole précis pour nommer le zéro (le néant).
403 signifie ainsi quatre fois cent (10²) plus aucune fois dix (10²) plus trois fois un (10°, par convention). Pour ces raisons, la meilleure numération de position est la duodécimale. Hélas, nous n'avons que dix doigts...