Quelle que soit l'origine et l'ancienneté du nom, celui-ci ne s'imposa vraiment au pays et à ses habitants qu'avec la formation du duché d'Alsace. On sait bien peu de chose sur les deux premiers ducs, Gondoin et Boniface, qui n'étaient encore que des fonctionnaires soumis à la volonté du roi. Le second pourtant fonda probablement vers 660 l'abbaye de Wissembourg et peu après celle de Munster : c'est à partir de cette époque que commença en grand le défrichement des forêts vosgiennes.
D'une tout autre envergure apparaît le troisième duc, Adalric, appelé aussi Atic ou Etichon.
Il était membre d'une illustre famille franque de haute Alsace, semble-t-il, mais par les alliances de sa famille avec des lignages lorrains établis en basse Alsace, il possédait aussi dans cette région des biens étendus. Les désordres du royaume lui permirent d'atteindre un haut degré de puissance.
Il prit une part active aux querelles entre Ebroïn, maire du palais de Neustrie, qui cherchait à rétablir par la force l'unité du royaume mérovingien, et ses nombreux ennemis.
Il soutint d'abord Ebroïn, puis se brouilla avec lui pour appuyer Pépin d'Herstal, maire du palais d'Austrasie. Ebroïn proclama la confiscation des biens d'Adalric, mais celui-ci conserva son pouvoir et l'élargit encore en exigeant la soumission complète du Sorngau (Jura bernois), jusque-là à demi autonome. Il fit massacrer une partie des habitants et assassiner l'abbé de Grandval, qui lui avait manqué de respect. La mort d'Ebroïn, la victoire de Tertry (687), à laquelle il prit part probablement aux côtés de Pépin, consolidèrent définitivement sa puissance et il put faire reconnaître son fils Adalbert comme comte d'Alsace.
Il fonda la célèbre abbaye de Hohenbourg, dont sa fille Odile fut la première abbesse.
L'histoire de sainte Odile ne nous est connue que par une « Vie » écrite deux cents ans plus tard et dont la plupart des épisodes romanesques sont assurément légendaires.
Mais il paraît certain que celle qui devait devenir la patronne de l'Alsace fut effectivement la fille du duc.
A la mort d'Adalric, son fils Adalbert (v. 693-722) lui succéda sans difficulté. Son long règne n'est marqué par aucun événement notable, mais sa puissance égala au moins celle de son père et il accapara à son profit divers domaines royaux : l'année de sa mort, il se glorifie d'avoir fait reconstruire la résidence royale de Koenigshoffen. Lui aussi fut un fondateur d'abbayes, notamment de Honau et de Saint-Etienne de Strasbourg, dont sa nièce Attale aurait été la première abbesse. Et lui aussi transmit sans peine sa charge à son fils Liutfrid (722 - v. 740).
La tradition lui attribue aussi la redécouverte du mur païen et la construction d'un château au sommet de l'antique Altitona ; il est toutefois invraisemblable que ce château ait été offert à Odile pour y faire son couvent : il est encore cité jusqu'au 10ème siècle, sans doute abandonné au profit du site des châteaux d'Ottrott. Le sommet était assez vaste pour accueillir un (petit) château, un (petit) couvent et un village.
Sources :
- Histoire de l'Alsace. PH Dollinger, Ed Privat 1970.
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